about

Chimie collective

Ghislain Botto (né en Bretagne en 1978) pratique la photographie là où d’autres dessinent ou peignent. Au delà de l’instantanée, du clic ou du cliché, de l’image attrapée, saisie ou gobée, il trace des lignes souvent directes, pose des aplats de couleurs ou de lumière, détourne l’oeil et part à la rencontre de motifs, de matières, de texture. Graphisme, sol, papier, il s’attache à noter des marques devant lesquelles la plupart des regards passent. Emu par la perte, par ce qui s’échappe, ce qui file il relève tantôt un journal qui devient avion dans la grande roue rotative d’une agence de presse (Edipresse), là le passage d’une femme visiteuse devenant ours le temps d’un battement de cil (Rumine), ici, un bal de bonzes en robe orangée dans le tournis d’un escalier délabré (Cambodge), ou encore le frottement insistant, languissant d’un bas de porte sur un mauvais parquet marquetté (1m²). En dehors de toute maîtrise, ses portraits deviennent des hommages au glissement, à la perte, à ce qu’on ne contrôle pas et qu’on n’affiche pas d’ordinaire.

Son travail est basé sur la rencontre avec un lieu, un espace, un intérieur, une personne ou même une rue. Et à cette occasion, un peu comme Georges Pérec et ses ‘tentatives d’épuisement d’un lieu’ Ghislain Botto égraine, collecte les anecdotes de ces paysages et personnages, en révèlent la singularité, la personnalité et le caractère. Au delà du portrait de personnes, Ghislain Botto réalise des portraits d’absents, l’artiste parle même de contre-portraits, dans lesquels les lieux témoignent : Une ode à l’éparpillement des vies, à l’éclatement des journées et des fragments d’eux. Le flou, le hors-champs participent à la lecture du non-dit, à la narration des secrets. Car chaque image chuchote une histoire, présente une excuse ou une hésitation. C’est cette suspension que l’artiste semble saisir.

Depuis le début de sa rencontre avec l’outil photographique, Ghislain Botto s’est glissé dans le collectif. L’apprentissange de la photographie, jeune adolescent avec un ami dans un laboratoire, opère semble t-il une magie révélatrice, chimique, et il maintient ce lien en dilettante tout au long de ses tentatives exploratoires d’étudiant tantôt en chimie, tantôt en physique, tantôt en beaux-arts tantôt en flânneur quasi professionnel. Au sein d’Ethnographic, il se glisse de nouveau dans un groupe où la sociologie et l’art laissent la place belle à l’autre, à la rencontre. De cette pratique, il a ainsi développé une grande pudeur vis à vis des images, comme une mise en retrait. La contrainte du groupe, de ses contraires et des caractères le met souvent au défi d’une juste émancipation, d’une diction, d’une certaine clarté. Il faut dire les choses simplement sans s’imposer, au service de l’expression de la justesse et d’une certaine modestie dans le rapport au sujet. Pas de reportage, non, on n’est pas là pour témoigner d’un haut fait, pour acclamer et réclamer mais bien pour noter, feuilletter, compulser. Absences, excuses, ses images fonctionnent par ellipse et raconte néanmoins le passage du temps. Il faut établir pour chaque série ce temps de rencontre, de dialogue, de conversation. Ces discussions peuvent être longues, patientes, pesantes … on ne jacasse pas face à ses images même si l’humour, le trait d’esprit illumine souvent une composition. Il y a un respect au sujet et au lieu non pas représenté, affiché mais juste évoqué.

L’oeil du photographe flâne et assemble des coins de compositions. Une sorte de chimie du moment, comme un squat improvisé qui se forme dans ses images. Pourtant nulle recomposition. Les formes sont là et n’ont qu’à être cueillies. Pour Argentine, les images se répondent avec malice et gaité : un lampadaire aux sphères écartées appelent une image de Christ en croix répondant à un ventilateur à quatre hélices lui-même jouant plastiquement des diagonales d’antennes etc.

Jouant avec le sujet, Ghislain Botto crée des images tiroirs où détournement croise représentation. Les plastiques deviennent chair (Intérieurs), les raclures de murs se font peaux et cicatrices (Stigmates). La forme éditoriale développée aux éditions de l’Eclosoir, parfois en petit format, travaillant les emboitages et les reliures apporte une forme plastique, physique et participe au trouble de la perception.

Ce rapport intimiste au sujet contraste résolument avec le résultat architecturé, maîtrisé et très composé de ses images. Les formes sont tracées et il y a une franchise et une résolution dans la présentation des objets. Les sols sont tranchés, les couleurs sont vives. Pas de filtre pour atténuer. Juste, parfois une recomposition dans un second temps accentue les diagonales ou aiguise les verticales.

Lucie Cabane

Formation

2002
DNAT section médias interactifs et réseaux, EESAB, Rennes
Licence professionnelle en design graphique et médias interactifs, mention,
Faculté de Rennes 2

1996
Baccalauréat scientifique, lycée Notre Dame du Vœu, Hennebont

Parcours professionnel

2010
Création du collectif Ethno-graphic

2007
Création des éditions de l’Éclosoir, association — directeur éditorial / photographe

2004
Création de l’Éclosoir, atelier de communication graphique, sarl — cogérant / photographe / webdesigner

Expositions

| collectif Ethno-graphic

2015
ARTBNB, artothèque d’Annecy
Portraits croisés, exposition urbaine, Annemasse/Ambilly
Portraits croisés, exposition urbaine, quartier des Grottes à Genève

2014
Ethnographic, Artothèque Pierre Tal-Coat, Hennebont

2013
Chorographie d’un territoire littéraire, Maison des Arts, Thonon-les-Bains
Quartiergraphie, Pôle-Sud, Lausanne

2012
Collonges, artothèque des Moyens du Bord, Manufacture des Tabacs, Morlaix
Quartiergraphie, 4 expositions urbaines, Caravane des quartiers, Lausanne
Au tour de soi, galerie de l’Étrave, Thonon-les-Bains
Fleur de Pavé, Forum de l’Hôtel de Ville, Lausanne
Fleur de Pavé, École Sociale, Lausanne

2011
Maisons de Dames, Galerie Humus, Lausanne
Fleur de Pavé, CHUV, Lausanne

2010
Complément d’objet, chroniques de Saint-Jean d’Aulps, Saint-Jean d’Aulps

2007
Encore Angkor?, Cambodge, INALCO, Paris 7

Expositions collectives | salons

2014
Photobookshow, galerie Vasli Souza, Malmö

2012
Se suivent et ne se ressemble pas, galerie de l’Étrave, Thonon-les-Bains

2011
Calendrier de l’Avent aux Bains des Paquis – cabines du plaisir, Genève

2007
Regards croisés , Argentine et Urugay, Plozévet

Résidences

2016
Résidence d’artistes dans le quartier des Ewües, Cluses

2015
Résidence d’artistes avec l’artothèque d’Annecy, Annecy

2012
Résidence d’artiste dans le quartier de Collonges, Thonon-les-Bains
Ateliers de Tully, Thonon-les-Bains

2010
Résidence d’artiste au centre Alexis Léaud organisée par l’ODAC, Saint-Jean d’Aulps
Ateliers de Tully, Thonon-les-Bains

2009
Ateliers de Tully, Thonon-les-Bains

Publications

2015
Portraits Croisés, éditions de l’Éclosoir
ARTBNB, éditions de l’Éclosoir

2013
Chorographie d’un territoire littéraire, éditions de l’Éclosoir
Quartiergraphie, éditions de l’Éclosoir

2012
Semaine volume X, éditions Analogues, maison d’édition pour l’art contemporain
Collonges, 1m2, éditions de l’Éclosoir
Catalogue Semaine 35.12, éditions Analogues

2011
Intérieur 01, éditions de l’Éclosoir
Intérieur 02, éditions de l’Éclosoir

2010
Complément d’Objet, éditions de l’Éclosoir

2009
Fleur de Pavé, n°4, éditions de l’Éclosoir
Fleur de Pavé, n°85, éditions de l’Éclosoir

Collections publiques

Artothèque d’Annecy
Artothèque d’Hennebont
Indie Photobook Library, Washington
CLA Collection du Livre d’Artiste, Belgique
ODAC 74 Office Départemental d’Art et de Culture, France
ERBA, Rouen, France
MGEN, France